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EFEO & Les Temples d'Angkor

Les Découvreurs d'Angkor.

Certains attribuèrent au naturaliste Henri Mouhot la découverte d'Angkor, mais ce n'est pas exact. Car avant lui, d'autres explorateurs, aventuriers, anthropologue... découvrirent ces temples cachés dans la jungle. Mais ces temples n'était cachés qu'à la vue des occidentaux, le peuple Khmer, les Siams et autres peuples d'Asie du sud-est connaissaient l'existence de ces merveilles. Et les Khmers, n'ont jamais oublié leur existence et, s'ils ont négligé la plupart des temples d'Angkor, Angkor Vat a toujours été occupé et vénéré.

Lorsque les notes posthumes de voyage de Henri Mouhot sont publiées, en 1863, conjointement à Paris et à Londres, l'Occident s'enthousiasma pour les merveilles d'Angkor. Et du coup, la découverte d'Angkor lui fut attribué !

Or, il y eu des prédécesseurs, comme le Père Bouillevaux, ou encore avant lui le moine portugais António da Madalena en 1586, ou encore un ambassadeur Chinois qui décrit dans son rapport de mission, en 1250, les merveilleux temples d'Angkor; mais à l'époque personne n'y prêta attention.

Après la publication des notes de Mouhot, chacun, en Europe, voulut voir les merveilles décrites : le photographe John Thomson, en mission en Asie du Sud-Est, détourna sa route pour prendre les tout premiers clichés d'Angkor. Il y eu aussi l'expédition du Mékong, emmenée par Ernest Doudart de Lagrée, avec Francis Garnier et Louis Delaporte, qui modifièrent leur itinéraire et foncèrent sur les temples d'Angkor...

Très vite les pionniers, tel Pierre Loti (1901), laissèrent la place aux chercheurs. Plusieurs mission européennes, généralement françaises pour des raisons historiques, se succédèrent au Siam (Thaïlande) jusqu'en 1907, date à laquelle les provinces de Battambang et de Siem Reap, incluant les temples d'Angkor, furent restituées au Cambodge.

Les Conservateurs d'Angkor.​

En 1898, la M.A.I. (Mission Archéologique d'Indo-Chine) fut créée. Elle devient l'Ecole Française d'Extrême Orient (EFEO) en 1900.

En 1902, le siège de l’École est installé à Hanoï  et complète les services administratifs du Protectorat. Elle en charge de : l'exploration archéologique, la collecte de manuscrits, la conservation des monuments, l'inventaire ethnographique des groupes ethniques, l'étude du patrimoine linguistique, et de l’histoire de toutes les civilisations asiatiques, de l’Inde jusqu’au Japon. En appui à cette vaste ambition scientifique, une bibliothèque et un musée compléteront l’installation de l'EFEO.

En 1907, la rétrocession des provinces occidentales du Cambodge par le Siam place les monuments d'Angkor sous la responsabilité de l'École. Jean Commaille accepte alors d'en assurer la surveillance en tant que commis des Services civils en mission à Angkor, mis à la disposition du Commissaire de Battambang par un arrêté du 4 décembre 1907. Six mois plus tard (juillet 1908), il devient officiellement le premier Conservateur du site, chargé de la conservation et de la restauration des monuments d'Angkor.

Sans attendre sa nomination officielle, il dresse avec E. Lunet de Lajonquière la liste des travaux de conservation à effectuer en priorité, notamment le dégagement d'Angkor Wat et du Bayon (BEFEO 7). Il assure cette fonction jusqu'en 1916, année où il fut assassiné par des bandits. Son tombeau se trouve dans l'angle sud-ouest du Bayon au milieu des arbres. Puis Henri Marchal lui succéda, et consacra toute sa vie à la rénovation des temples d'Angkor et particulièrement Banteay Srey. D'autres, comme Henri Parmentier,  Bernard-Philippe GroslierJean Laur, furent les derniers conservateurs français d'Angkor...

Le 14 décembre 1992, le Comité du Patrimoine Mondial de l'UNESCO classe temporairement Angkor sur la liste des Sites du Patrimonial Mondial en danger, dans l'attente de la création de CIC (Comité International de Coordination). Ce dernier fut créé en octobre 1993,
 à la suite de la Déclaration de Tokyo par l’UNESCO et reconduit par la Déclaration de Paris en 2003. Ainsi, le Comité International de Coordination pour la sauvegarde et le développement du site historique d'Angkor assure la coordination entre trente pays et un groupe d'experts Ad-hoc pour des projets scientifiques, de restauration et de conservation. Ce Programme international se distingue par son approche novatrice, associant étroitement les opérations de sauvegarde aux efforts en matière de développement durable.

La réussite de la conservation du site par l’Autorité nationale APSARA, suivie par le CIC-Angkor, a été récompensée par le retrait du bien de la Liste du Patrimoine mondial en péril en 2004. De même, les efforts consentis par le CIC-Angkor pour la protection des sites ont permis le développement économique et social de la région par la formation de professionnels, la création d’emplois, l’autonomisation des femmes.

Angkor est ainsi devenu un laboratoire vivant faisant la preuve du potentiel du tourisme durable, de l’artisanat, de la pleine mobilisation des communautés locales pour la cohésion sociale.

Des équipes de diverses nationalités, placées sous l'autorité du CIC, travaillent à la rénovation des monuments :

  • Allemagne : Apsaras d'Angkor Vat;
  • Amérique :  Temple Preak Khan;
  • Chine :        Temple Chau Say Tevoda;
  • Japon :        Temples Bayon, Prasat Suor Prat, Banteay Kdei;
  • Italie :          Temple Près Rup;
  • France :      (EFEO) temple Baphûon, terrasses des éléphants et du Roi lépreux...

Les Pilleurs d'Angkor.​

Les deux pilleurs les plus connus sont Louis Delaport (1873-1882) et André Malraux (1923). 

C'est en 1866 que Louis Delaporte, qui fait partie de la mission française d'exploration du Mékong, avec Ernest Doudart de Lagrée et Francis Garnier, découvre Angkor. Le choc esthétique qu'il éprouve en visitant ces ruines scelle son destin. Après une interruption due à la guerre de 1870, il peut repartir en 1873, avec l'appui de la Société de géographie. Il obtient des ministères de la Marine, des Affaires étrangères et de l'Instruction publique, une double mission : vérifier la navigabilité du fleuve Rouge de son delta jusqu'au Yunnan et constituer la première collection officielle d'art khmer en France. En fait, un blanc- seing pour  un pillage officiel !

Louis Delaporte, dans des conditions très difficiles, effectue une moisson archéologique constituée de statues, fragments d'architecture et moulages, auxquels s'ajoutent documents topographiques et dessins. Certains sites sont littéralement pillés, sauf le temple du Bayon qu'il dégage et Angkor Vat dont il relève le plan. Transporté à dos d'éléphants et par radeau le tout est chargé sur la canonnière Javeline qui prend le chemin du retour. Il dit avoir acheté ou échangé ces pièces auprès des autorités locales et avait l'appui et l'approbation du Gouverneur général de l'Indochine et du roi Norodom Ier du Cambodge. Ce qui était un mensonge, oui mais un mensonge d'état !

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André Malraux, qui n'était pas encore cet homme d'État, à la voix enflammée et chevrotante, auteur de "La Voie Royale" décrivant son aventure au Cambodge, s'empressa de prendre "La Voie Déloyale" pour piller les temples d'Angkor. Il était fasciné par l'art de l'Orient et fréquentait régulièrement le Musée Guimet ou l'École Française d'Extrême-Orient où Il avait trouvé dans un bulletin de 1919, une description du temple de Banteay Srey. Il constata que cette petite merveille n'était pas classée. Alors se mélangèrent dans son esprit, l'avidité de ses rêves esthétiques et ses soucis pécuniaires. L'idée de visiter l'Extrême-Orient et en même temps dérober quelques statues non répertoriées, échappant à tous contrôles, devint une obsession.

Malraux obtint une autorisation du gouvernement français, mais uniquement pour "étudier les anciens monuments de l'architecture khmère. L'expédition était lancée ! Après vingt-neuf jours de traversée, l'aventure commença : les boucles du Mékong, Phnom Penh, le Grand Lac « Tonlé Sap » et l'arrivée à Siem Reap, le village proche des temples d'Angkor, où Malraux, fort de son ordre de mission, s'empressa de rencontrer le représentant de l'administration coloniale.

Celui-ci prévint Malraux : « les temples de la région sont des monuments historiques, ils sont protégés depuis peu par une loi. »

Mais, le cupide Malraux ne l'entendit pas de cette oreille. Il mit le cap sur Banteay Srey, à une trentaine de kilomètre au nord d'Angkor, considérant que toute ruine est bonne à prendre. Après deux jours de progression pénible à travers la forêt, l'expédition arriva au temple. La « Forteresse de la pucelle », comme traduisit librement Clara Malraux dans ses mémoires, n'était encore, en ces années vingt, qu'un magnifique éboulis d'Apsaras et de bas-reliefs délicatement sculptés dans le grès rose. La petite équipe s'acharna sur le temple écroulé. Des jours de labeur et d'excitation fiévreuse pour arracher un morceau d'éternité à cette décharge irréelle. Mais la pierre résista et les scies cassèrent.

Finalement, ils réussirent à charger quatre grands morceaux de bas-reliefs, et une tonne de pierres sculptées sur les chars à bœufs, qu'ils embarquèrent sur un sampan à voile, direction Phnom Penh via le Tonlé Sap. Mais, ce que Malraux ignorait, c'est que l'un de ses guides khmers avait vendu la mèche et que ses moindres faits et gestes étaient rapportés. Avant même son arrivée, les autorités coloniales furent averties de ses relations avec les antiquaires et de sa situation financière catastrophique.

Donc, au soir du 23 décembre 1923, quand le couple Malraux, fourbu, arriva à Phnom Penh, les gendarmes qui les attendaient n'étaient pas venus leur souhaiter un bon Noël ! Ils furent assignés à résidence pour une période de six mois. André Malraux, échappa in-extremis à la prison. Les autorités coloniales voulaient lui infliger une punition exemplaire, afin de décourager les futurs pilleurs. Mais, soutenu par de nombreux intellectuels français il obtint la clémence.

Hommages à nos Illustres Chercheurs & Conservateurs d'Angkor

Jean Commaille

Né à Marseille, 1868 - Assassiné à Siem Reap, 1916

Fils de soldat, élève de l'école militaire de La Flèche, Jean Commaille semble renoncer à la carrière militaire pour se consacrer au dessin. Cependant, sans ressource, il finit par s'engager dans la Légion étrangère où il est nommé Garde principal de la milice cambodgienne, en janvier 1896. À l'issue de son engagement en 1898, il trouve un emploi au Cambodge dans les Services civils du Protectorat, comme commis auxiliaire de comptabilité.

En 1900, il entre à l'EFEO comme secrétaire-trésorier et se voit confier l'installation du premier musée de Saigon. Peu après, il doit assurer le transfert des collections à Hanoi, où seront désormais centralisés le siège de l'EFEO et les services administratifs du Protectorat. Il est parallèlement chargé d'organiser une fouille à Bassac, au sud-est de Phnom Penh.

En 1907, la rétrocession des provinces occidentales du Cambodge par le Siam place les monuments d'Angkor sous la responsabilité de l'École. Jean Commaille accepte alors d'en assurer la surveillance en tant que commis des Services civils en mission à Angkor. Six mois plus tard (juillet 1908), il devient officiellement le premier Conservateur du site, chargé de la conservation et de la restauration des monuments d'Angkor, et ordonne les travaux de conservation à effectuer en priorité, notamment le dégagement d'Angkor Vat et du Bayon.

Ses efforts portent principalement sur le dégagement d'Angkor Vat (1908-1910) et du Bayon (1911-1914), mais aussi sur les chaussées nord et sud d'Angkor Thom (1910-1912), les Terrasses royales (1911) et les Preah Pithu (1912). Il entreprend enfin, au Baphuon, le débroussaillement du Bouddha couché (1908), les photographies de ses bas-reliefs (1912) et les premiers sondages (1915).

C'est en se rendant sur les chantiers avec la paye de ses ouvriers qu'il est assassiné le 29 avril 1916. Jean Commaille est inhumé à proximité du Bayon, dans un caveau surmonté par un pyramidion érigé en sa mémoire. Trois de ses agresseurs sont condamnés à mort et exécutés à Phnom Penh tandis que son serviteur purge 18 mois de prison, pour s'être enfui après le meurtre.

Henri Marchal

Né à Paris, 1876 - Décédé à Siem Reap, 1970

Archéologue français, il étudie l'archéologie aux Beaux-Arts de Paris par vocation et débarque en 1905 au Cambodge, pays de ses rêves. Tout d'abord adjoint de Jean Commaille, premier Conservateur d'Angkor, il entreprend avec lui le dégagement de la plupart des temples, a commencer par Angkor Vat enfoui sous la terre et la végétation. Il restera Conservateur de 1916 à 1953, avec des intermèdes de plusieurs années durant lesquelles il se consacrera à ses fonctions de directeur du service archéologique de l'École Française d'Extrême Orient. Il n'y a guère de monuments du groupe d'Angkor qu'il n'ait peu ou prou dégagé, restauré (avec souvent des moyens de fortune). A la retraite en 1933, il fut rappelé à la conservation d'Angkor à deux reprises de 1935 à 1937, puis  en 1947 - il avait soixante et onze ans ! - pour diriger la conservation d'Angkor .

Il revint en France en 1953, mais, incapable de s'adapter à sa nouvelle vie, il retourna bientôt en Indochine où il occupa divers postes au Viêt-nam et au Laos avant de se fixer définitivement à Siem Reap en 1957, auprès des temples d'Angkor qu'il avait si bien servis. C'est là qu'il mourut en avril 1970.

L'immense modestie de cet homme a pu faire oublier qu'il a rédigé un nombre considérable d'études sur les monuments, qui restent absolument indispensables par la qualité des observations.

Il a introduit au Cambodge les méthodes de restauration utilisée à Java, notamment l'anastylose. Utilisant des matériaux modernes, il parvient ainsi à recomposer et consolider, de manière visible et avouée, un certain nombre de temples encore debout aujourd'hui.

Ce fût un homme simple et courageux, surnommé "le Sage" par ses amis de l'EFEO et "le bon génie" par les Khmers

NB : Sapho, fille de Henri Marchal, a publié en 1997, chez l'Harmattan, Paris, Costumes et parures khmers d'après les devata d'Angkor Vat.

Henri Parmentier

Né à Paris, 1871 - Décédé à Phnom Penh, 1949

Bachelier ès lettres et ès sciences en 1888-1890, il entre à l'École des beaux-arts, section architecture, en 1891. Nommé pensionnaire-architecte de l'EFEO naissante, il débarque en novembre 1900 en Indochine, qui va devenir sa deuxième patrie. Sa première mission consiste en l'étude et la sauvegarde des monuments Cam, très peu connus à l'époque et souvent confondus avec des temples khmers. Après un repérage complet, il entreprend de longues campagnes de fouilles sur les sites de Mi Son en 1903-1904, de Dong Duong, de Chanh Lô en 1905 et de restauration des temples de Po Nagar en 1905 et de Po Klaung Garai en 1908. 

En 1904, il est nommé chef du service archéologique de l'EFEO et organise, une première mission à Angkor. Avec deux collègues, il effectue un relevé complet des bas-reliefs du Bayon. En novembre 1905, il organise la Conservation d'Angkor et, en 1908, l'installation des collections du musée de l'EFEO à Hanoi. Il réalise les plans du musée d'art Cam de Danang, qui sera achevé en 1919 et agrandi en 1936. Le musée recevra officiellement, à cette occasion, le nom de musée Henri Parmentier.

En 1907, l'École commence un programme de travaux sur le site d'Angkor ; Il met en place un programme de conservation des édifices. En 1911, l'étude des temples de Sambor (Kompong Thom), jusque-là considérés comme Cam, l'amène à définir un nouvel art : l'art pré-angkorien. Il étudie, entre autres, les bas-reliefs du grand temple de Bantey Chmar, les temples de Vat Phu, de Vat Nokor, l'architecture khmère ancienne d'après les bas-reliefs du Bayon et, en 1926, le temple de Bantey Srei.

En 1932, il dégage le temple du Krol Roméas sur le Phnom Kulen. Atteint par l'âge de la retraite, mais choisissant de continuer à travailler pour l'EFEO, il est nommé Chef honoraire du Service archéologique.

En 1933, il décide de mettre à jour L'inventaire des monuments indochinois mais sa santé affaiblie par ses nombreux séjours dans la brousse ne lui permet pas de poursuivre ce travail sur le terrain. Il se fixe alors définitivement au Cambodge. Il consacre les dernières années de sa vie à la réalisation d'un travail sur l'art du Laos et du Cambodge, mais le pillage de sa bibliothèque, lors de l'occupation japonaise, le prive d'une partie de sa documentation.

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